11.12.09

non, je n'ouvrirai pas mes rideaux.

Ca m'a pris d'un seul coup, sans prévenir. La bombe sur les bridés, les grosses semelles des combinaisons blanches sur la Lune, Schwarzenneger qui débarque chez toi, la seconde où l'on réalise qu'on ne tiendra pas sa promesse de ne pas jouir dans sa bouche. Pourtant, tout allait bien. La musique était bien. Le rire arrivait à venir tout seul. Les verres refusaient de montrer leurs fonds. Les filles étaient jolies -enfin, suffisamment bien habillées et avec suffisamment de maquillage pour qu'on le croit. Et puis, j'ai senti le vide. Le grondement impératif qui rompt toute discussion et qui, aidé par l'alcool, dicte sa loi. J'ai la dalle. Je ne sais pas depuis combien de temps je n'ai pas eu un vrai repas mais, là, c'est pire que tout. J'abandonne le mec qui me racontait sa vie seul face à son absence d'anecdote et fonce directement vers le bout de carrelage blanc que j'ai aperçu en entrant dans l'appartement. L'instinct vient de m'envoyer un Wizz (d'où le qualificatif de primaire) pour me signaler que c'est par là que je trouverai un frigo. Effectivement, il y en a un, derrière une blonde entrain de se faire moudre les lèvres par un type avec une chemisette et une casquette des Spurs de San Antonio. Je glisse ma main contre ses fesses, carresse la poignée du frigo en maugréant un mot d'excuse, pour n'être plus que face à des étagères désertes, agrémentées de condiments et de tupperware vides. Je rêve du Bon Marché, de la Grande Epicerie, de la nuit que je ne passerai jamais dans un Leclerc, à me casser le ventre sur tout ce que je trouve. On me caresse les côtes d'un geste délicat, la fille de tout à l'heure probablement. Ta gueule, j'ai la dalle. Désolé d'être agressif; dis-moi où je peux trouver un kebab, et le saint graal ne sera rien de mieux qu'un gobelet en plastique. Impossible, on est soir de match et l'Algérie a perdu contre une bande d'inconscients et nos rues ne demandent qu'à égorger du blanc. Pas de kebab. Si, en haut de l'étagère, il y a un éclat blanc. L'intérieur scintille, tout de carrés en diamants. Un kilo de sucre de chez Carrefour. Je tiendrai jusqu'à l'aube.

9.12.09

tu dis n'importe quoi, ma toute belle.

Les choix politiques des jeunes se résument alors à choisir quel côté, doré ou argenté, de la couverture de survie ils préfèrent, quels insultes ils ne jetteront pas à la gueule du nouveau copain de leur ex, quelle bouteille de whisky ils n'achèteront pas pour boire seuls chez eux, comme dans les films. Le type devant moi se frotte les lèvres avec le pouce, est probablement persuadé que Belmondo est un gros con, et n'a toujours pas enlevé l'étiquette de son protège-documents 80 vues Eco+. Le seul produit Eco+ que j'achèterai jamais sera du désherbant, pour faire sauter la permanence UMP du bout de ma rue. Non, les jeunes ne sont pas frustrés, leur connexion internet a lâché, alors il fallait bien qu'ils trouvent un truc à faire à la place. On aurait pu continuer à fantasmer sur la voisine du devant dont le haut choit délicieusement sur son épaule, laissant apercevoir une bretelle de soutien gorge mille fois plus sensuelle qu'une vidéo dont les tags oscillent entre rough et anal. On aurait aussi pu rester habiter dans la cave de nos parents en cherchant la meilleure résolution possible d'une vidéo de taylor swift. On aurait probablement du, ça aurait évité beaucoup de paperasse à la fac, à la mutuelle, et au commissariat.

8.12.09

son prénom, c'est vraiment Nagui ?

j'ai envie de me souvenir de ce bout de poème, et l'interface d'OpenOffice est bien trop moche pour que je l'y colle sans que ça ne revienne me hanter cette nuit, donc j'envoie au diable les stéréotypes adolescents qui ne recopient même plus du one-legged-arthur pour laisser ça.

"Etre saoul, vous ne savez pas quelle victoire
C'est qu'on emporte sur la vie, et quel don c'est !
On oublie, on revoit, on ignore, et l'on sait;
C'est du mystère plein d'aperçus, c'est du rêve
Qui n'a jamais eu de naissance, et ne s'achève
Pas, et ne se meut pas dans l'essence d'ici."

Verlaine, Jadis & Naguère.

6.12.09

PEIGNONS DES NUMEROS SUR DES CARAPACES ET ORGANISONS DES COMBATS DE CRABES

la main de la fille devant moi, qui ne cesse de tapoter l'anse de son sac, me fatigue encore plus que les vaines tentatives de la vendeuse pour savoir si certain pack de bières a une quelconque promotion. c'est qu'elle veut faire plaisir au consanguin assoiffé fiché devant son comptoir. l'autre (celle qui m'énerve) est vaguement blonde, doit frôler les vingt ans, sent plutôt bon, et elle se ronge les ongles. [[talk about a turn-off / The Kinks - Lola]].

je sens que ça piaffe d'irritation, derrière moi. c'est vrai que mon casque n'isole pas du tout, et qu'on entend tout ce que j'écoute parce que c'est toujours trop fort. grâce à ça, l'hypothétique vieux derrière moi a déjà pu se replonger dans les souvenirs qu'il garde de son ancien [[correspondant berlinois / Tangerine Dream - Ricochet]].

je ne sais même pas si c'est un de ces vieux qui se ressemblent tous, beigeâsses, bornés et secrètement laconiques. ça n'est peut-être qu'une mère de famille qui, dans sa folle jeunesse, avait acheté en cachette son [[vinyle de transformer / Lou Reed - Hangin' Round (acoustic)]].

mais ce vernis rouge vif -pourtant une valeur sûre dans ce monde qui affole même [[nicolas hulot / Trailer Syndrome du titanic]]- ne cesse de s'agiter sur le cuir du sac Longcheum, et j'ai une envie formidable, qui grimpe depuis mon poing jusqu'à ma mâchoire contractée, de lui arracher chacun de ses ongles pour lui en faire un collier (sérieusement, ça pourrait être très joli), après avoir creusé des petits trous nets et ronds dans ses gencives, mais je dérive bien trop vers anxiolytiques, patrick bateman et les [[talking heads / Nouvelle Vague - Road to Nowhere]] pour un supermarché de quartier.

le moche a délicatement emmené sa pisse pétillante, la fille s'en est allée avec ses carottes et son vin blanc, la caissière sans âge tripote mon whisky pour trouver le code barre et fait mine de ne pas entendre les [[sons étranges / Pink Floyd - Hey You Trance Remix]] qui giclent de mes oreillettes molletonnées.

4.12.09

consanguiniser, c'est tricher.

quand ils demandent de l'argent, les clochards ne disent quasiment jamais « s'il vous plaît ». je veux dire, ils peuvent être pauvres, laids, avoir des fringues de merde, des cheveux gras et fumer du shit dégueulasse pour [[se défoncer en pensant à leur enfance / Sun Ra - Spaceship Lullaby]], mais ils ont tout de même le droit d'être poli quand ceux qu'ils happent à la sortie des supérettes ont l'inconscience de leur filer vingt centimes pour renflouer leur budget misère.

au-dessus, dans leurs triplex infinis avec des piscines au premier étage, les joyeux lurons des classes immensément supérieures n'ont probablement pas ce souci; emburkanés dans leurs hoodies american apparel, ça écoute des [[rappeurs US inconnus / Mickey Avalon - Waiting To Die]] qui les rendent cool auprès des amas humanoïdes de mascara et de vestes en jean trop courtes (qui n'ont pas pu être achetées à Brick Lane parce que y'a des pakis partout et qui dit peau sombre dit blanche en danger). ça porte des tee-shirts des clash, des ramones, des beatles et de joy division : on se démarque comme on peut des [[sonneries de portable de collège / The Kooks - Seaside]].

si jamais un type complètement dérangé (de fait nominé à la médaille des services rendus à la nation) organisait une bataille rangée entre, disons, quatre clochards et une demi-douzaine de mèches brunes, je me demande qui gagnerait (on ne compte pas les chiens des clochards, bien sûr). à l'évidence, si les amalgames sus-mentionnés supportent leurs mâles en [[s'agitant dans tous les sens / Them Crooked Vultures - New Fang]], et gueulent de foutre un coup de schmooves dans le piercing nasal du grand avec les dreads, les lycéens peuvent peut-être tenir plus de cinq minutes. quoi que, si on finit tout de même par lâcher les [[clébards galeux / Pink Floyd - Mademoiselle Knobs]], les paris peuvent être faussés et le bookmaker risque de finir dans une benne à ordures avec un sac en plastique Monoprix sur son gros nez.

ad majoram [[ludwig von krauthoven / Stanley Kubrick - Joy Hymn]] gloriam.